ePrivacy and GPDR Cookie Consent by Cookie Consent

Les baux commerciaux

Le statut des baux commerciaux est encadré par les articles L145-1 et suivants du Code de commerce. Des modifications importantes visant à rééquilibrer les relations entre bailleurs et preneurs ont été apportées par la loi dite Pinel du 18 juin 2014 et par le décret du 3 novembre 2014. Quelques dispositions sont d’ordre public, mais la matière relève principalement de la liberté contractuelle et doivent donc faire l’objet d’une négociation entre les parties. Vous trouverez ci-après les réponses non exhaustives aux questions les plus fréquemment rencontrées au cours de la vie d’un bail commercial.

I- La conclusion du bail commercial

1- Le bail commercial doit-il obligatoirement être écrit ?

Aucune forme particulière n’est exigée pour la validité du bail. Toutefois, il est indispensable d’avoir un bail commercial écrit afin de pouvoir être en mesure d’en prouver l’existence et les conditions.
Le bail pourra prendre la forme d’un acte authentique (rédigé par un notaire) ou bien d’un acte sous seing privé (rédigé et signé par les parties). Dans ce second cas, chacune des parties devra disposer d’un exemplaire signé du bail qui sera ensuite enregistré afin d’être opposable aux tiers.
A noter tout de même que l’article 504 du Code général des impôts impose, pour les débits de boissons, la rédaction d’un acte authentique.
Dans l’intérêt des parties et pour plus de sécurité juridique, le bail devra être le plus précis possible et envisager au maximum les situations qui pourraient poser difficulté au cours de l’exécution du bail (charge des travaux, loyer, détail des charges…).

2- Le bail commercial est-il obligatoirement conclu pour une durée de 9 ans ?

La durée du bail commercial ne peut être inférieure à 9 ans (article L. 145-4 du Code du Commerce). Les parties peuvent prévoir une durée supérieure, mais le bail ne doit pas avoir une durée indéterminée.

Il existe également un bail de courte durée (ou bail dérogatoire) prévu par l’article L. 145-5 du Code de commerce. Ce type de bail ne bénéficie pas du statut des baux commerciaux, il ne confère donc aucun droit au renouvellement au profit du locataire.
La durée d’un bail de courte durée ne doit pas excéder trois ans.

Au terme du bail si le locataire reste dans les lieux le bail est requalifié en bail commercial.

3- Le loyer est-il soumis à des règles particulières au moment de la conclusion du bail ? Peut-il être augmenté en cours de bail ?

Lors de la conclusion du bail le loyer est librement fixé par les parties.

En cours de bail, à défaut de clause d’indexation, le loyer peut être révisé tous les trois ans, en fonction de l’évolution de l’indice trimestriel des locaux commerciaux publié par l’INSEE.
Si aucun indice trimestriel n’est référencé au contrat, l’indice de base à retenir sera celui du trimestre au cours duquel le loyer a été révisé pour la dernière fois, et l’indice de comparaison sera celui du même trimestre publié trois ans après.
La demande de révision doit être formée par acte extrajudiciaire ou par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Elle doit à peine de nullité, préciser le montant du loyer demandé.
A l’expiration de la période triennale, la révision peut être demandée à n’importe quel moment et sans limite de temps.

En présence d’une clause d’indexation (ou clause d’échelle mobile), le montant du loyer sera indexé à un indice choisi par les parties.
La périodicité d’application de la clause d’échelle mobile est laissée à la libre appréciation des parties.
La révision s’appliquera automatiquement aux dates d’échéance fixées par le bail sans qu’il soit nécessaire de demander l’application de la clause.


Etat des lieux et inventaire des charges

Lors de la conclusion du bail, de la cession du droit au bail, de la cession ou de la mutation du fonds et lors de la restitution des locaux, un état des lieux doit être établi.
Un inventaire précis et limitatif des catégories de charges, impôts, taxes et redevances liés au bail doit être établi.
Un récapitulatif doit être adressé annuellement par le bailleur au locataire.

Lors de la conclusion du contrat et tous les trois ans, le bailleur communique au locataire :

  • Un état prévisionnel des travaux qu’il envisage de réaliser dans les trois années suivantes,
  • Un état récapitulatif des travaux qu’il a réalisé au cours des trois années précédentes.

II- L’exécution du bail

4- Quelles sont les principales obligations du bailleur ?

Le bailleur a une obligation d’information vis-à-vis du locataire.
Il est tenu, lors de la signature du bail, de fournir au locataire une information relative à l’existence de certains risques environnementaux : risques naturels et technologiques, existence de sinistres, risques de pollution des sols, diagnostic de performance énergétique.

Le bailleur est tenu de mettre à la disposition du locataire le bien loué ainsi que ses accessoires (cave, grenier, doit de passage…).
Cette obligation suppose la délivrance d’un bien conforme à sa destination contractuelle. C’est-à-dire permettre d’exercer l’activité prévue par le bail.

Le bailleur doit en outre garantir le locataire des vices ou défauts de la chose louée qui empêcheraient l’usage du bien loué ainsi que des troubles qui pourraient lui être causés par le bailleur ou par des tiers.

5- Quelles sont les principales obligations du locataire ?

Le locataire doit user raisonnablement de la chose louée, c’est-à-dire ne pas utiliser le local de façon anormale.
Il doit se conformer à la destination des lieux et ne pas exercer dans les lieux une activité pour laquelle il n’aurait pas eu d’autorisation préalable.

Le locataire est en outre tenu de payer le loyer et les charges aux termes contractuellement déterminés et selon les modalités prévues.

Il doit entretenir les lieux loués afin de les rendre dans l’état dans lequel ils étaient à son arrivée.

6- Comment les travaux sont-ils répartis entre les parties ?

La répartition des travaux entre le propriétaire et le bailleur doit être prévue par le bail commercial.

  • Les travaux à la charge du bailleur

Les travaux relatifs aux grosses réparations mentionnées à l’article 606 du Code civil ne peuvent plus être imputés au locataire.
Cette disposition est d’ordre public mais n’est applicable qu’aux contrats conclus ou renouvelés à compter du 5 novembre 2014.
Par grosses réparations on entend : les gros murs, voûtes, rétablissement des poutres et des couvertures, digues, mur de soutènement et de clôture.

Les dépenses relatives aux travaux ayant pour objet de mettre le local en conformité avec la réglementation (par exemple travaux de mise en accessibilité) ne peuvent pas être imputées au locataire dès lors qu’ils relèvent des grosses réparations.

Aucune des réparations réputées locatives n’est à la charge des locataires quand elles ne sont occasionnées que par la vétusté ou un cas de force majeure (article 1755 du Code civil).
La vétusté est définie comme l’état de ce qui est abîmé par le temps. Les détériorations ne doivent pas être la conséquence d’un usage anormal ou d’un mauvais entretien.
Cette disposition n’est toutefois pas d’ordre public et le bail peut mettre à la charge du locataire les réparations occasionnées par la vétusté (dès lors que celles-ci ne relèvent pas des grosses réparations).

  • Les travaux pouvant être imputés au locataire

Toutes les réparations autres que les grosses réparations peuvent être mises à la charge du locataire. Il s’agit des travaux d’entretien, de réparation ou bien d’embellissement.
Exemples de réparations d’entretien : maintien en état de propreté des plafonds, murs intérieurs et cloisons, entretien des parquets, moquettes, remplacement d’une chaudière…

Lors de la rédaction du bail, il est essentiel d’être vigilent à la rédaction des clauses liées aux travaux car celles-ci sont une grande source de contentieux.

7- Le locataire peut-il librement changer d’activité ou adjoindre une nouvelle activité ?

Le locataire doit user de la chose louée suivant la destination donnée par le bail.
Il est donc essentiel que l’activité prévue par le bail corresponde réellement à l’activité exercée dans les locaux.
Toute modification d’activité envisagée par le preneur nécessitera l’accord préalable du bailleur. L’accord du bailleur ne peut pas résulter d’une simple tolérance. Il doit être non équivoque. Il est recommandé que cette modification fasse l’objet d’un avenant au bail ou bien d’un accord écrit du bailleur.

Par ailleurs, le locataire peut modifier son activité selon une procédure dite de « déspécialisation » lui permettant d’adjoindre une activité connexe ou complémentaire (déspécialisation partielle) ou bien de transformer son fonds de commerce (déspécialisation plénière).

Ainsi l’article L145-47 du Code de commerce autorise le locataire à adjoindre une activité connexe ou complémentaire à l’activité prévue au bail.
Il doit pour cela respecter une procédure spécifique : notifier son projet d’activité connexe ou complémentaire au bailleur par acte d’huissier ou par lettre recommandée avec AR. Le bailleur devra répondre dans un délai de deux mois. Il ne lui est possible de refuser que dans le cas où la nouvelle activité ne serait pas connexe ou complémentaire.
En cas de refus, le locataire pourra saisir le tribunal de grande instance. Il appartiendra alors au juge de déterminer si l’activité est ou non connexe ou complémentaire.

Le locataire peut également solliciter un changement total d’activité (déspécialisation totale prévue par l’article L145-8 du Code de commerce). Pour cela, il doit être dans la nécessité économique de changer d’activité et mettre en place une activité compatible avec la destination, les caractères et la situation de l’immeuble.
Le locataire doit formuler sa demande de changement d’activité auprès du bailleur par acte d’huissier ou lettre recommandée avec AR. Le bailleur devra répondre dans les trois mois. Il ne pourra s’opposer au changement d’activité qu’en cas de motif grave et légitime.

Il est à noter que le changement d’activité peut entraîner le paiement d’une indemnité de déspécialisation égale au montant du préjudice dont le bailleur établirait l’existence.
Le bailleur peut également solliciter une modification du montant du loyer. La modification pourra intervenir immédiatement en cas de déspécialisation totale ou le cadre de la prochaine révision de loyer en cas de déspécialisation partielle.


Droit de préemption du locataire

Le preneur bénéficie d’un droit de préemption en cas de vente du local.
Si le propriétaire envisage de vendre le local, il doit en informer le locataire par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, ou remise en main propre en indiquant le prix et les conditions de la vente envisagée.
Le locataire dispose d’un délai d’un mois pour faire connaître au bailleur son intention d’accepter ou de refuser l’offre.


III- Le renouvellement du bail commercial

8- Qui doit être à l’origine de la demande de renouvellement du bail commercial ?

Il appartient en principe au bailleur d’adresser au locataire un congé avec ou sans offre de renouvellement six mois avant l’arrivée du terme (article L145-9 du Code de commerce). Le congé doit être donné par acte extrajudiciaire, c’est-à-dire par acte d’huissier.

A défaut de congé adressé par le bailleur au locataire, le locataire peut adresser une demande de renouvellement au bailleur (également six mois à l’avance) par acte extrajudiciaire ou bien par courrier recommandé avec demande d’avis de réception (article L145-10 du Code de commerce).
L’absence de réponse du bailleur dans un délai de trois mois vaut acceptation tacite du principe du renouvellement.

A défaut de congé ou de demande de renouvellement de l’une ou l’autre des parties, le bail se prolonge tacitement à l’arrivée du terme.
Il est à noter le risque de déplafonnement du loyer d’un bail qui, par l’effet de la tacite prolongation, excèderait douze ans.

9- Comment le montant du loyer du bail renouvelé est-il fixé ?

A moins d’une modification notable des facteurs locaux de commercialité, et dès lors que la durée du bail n’excède pas douze ans, la variation du loyer applicable au bail à renouveler ne peut pas excéder la variation des indices des loyers commerciaux publiés par l’Insee (article L 145-34 du Code de commerce).

Le calcul du loyer applicable au bail renouvelé s’effectuera de la façon suivante : (Montant du loyer X dernier indice connu N) / indice de référence N-9 = loyer du bail renouvelé.

En cas de déplafonnement du loyer (modifications des éléments, durée du bail…), les augmentations ne peuvent pas être supérieures, pour une année, à 10% du loyer acquitté au cours de l’année précédente.


Le cas particulier des locaux monovalents tels que les hôtels

L’article R 145-10 du Code de commerce précise que le prix du bail des locaux construits en vue d’une seule utilisation (tels que les hôtels) peut être déterminé selon les usages observés dans la branche d’activité considérée.
La valeur locative des hôtels s’apprécie à partir de la recette théorique globale hors taxes à laquelle sont appliqués des correctifs.


En cas de désaccord sur la fixation du loyer, les parties peuvent soumettre leurs litiges à la commission départementale de conciliation des baux commerciaux, composée de représentants des bailleurs, des locataires et de personnes qualifiées. Peuvent être soumis à la commission les litiges relatifs à la fixation du loyer du bail renouvelé et ceux relatifs à la révision du loyer, aux charges et aux travaux.
Elle ne pourra toutefois pas intervenir dans le cadre des baux ne relevant pas de la règle du plafonnement (ex : locaux monovalents ou bien baux d’une durée supérieure à douze ans).

Il est en outre possible de contester la fixation du loyer du bail révisé ou renouvelé devant le tribunal de grande instance sous un délai de deux ans.

IV- La fin du bail

10- De quelle façon le bail commercial peut-il prendre fin ?

Résiliation à l’issue d’une période triennale
Le locataire a la faculté de résilier le bail à l’issue de chaque période triennale. Il devra adresser son congé au bailleur par lettre recommandée avec AR ou bien par acte d’huissier au moins six mois à l’avance.

Le bailleur a la faculté de donner congé à l’expiration d’une période triennale pour un des motifs limitativement énumérés par l’article L145-4 du code de commerce (afin de construire, reconstruire ou surélever l’immeuble existant, de réaffecter le local d’habitation accessoire, de transformer à usage principal d’habitation un immeuble existant, d’exécuter des travaux dans le cadre d’une opération de restauration immobilière et en cas de démolition de l’immeuble dans le cadre d’un projet de renouvellement urbain).

La clause résolutoire
Il est fréquent que les baux commerciaux prévoient une clause par laquelle la résiliation de plein droit serait acquise au bailleur en cas de manquement par le locataire à une seule de ses obligations.
Il pourra s’agir par exemple d’un non-paiement de loyer ou bien d’une sous-location non autorisée par le bail…
Cette clause ne pourra toutefois produire d’effets qu’un mois après commandement demeuré infructueux (article L145-41 du Code de commerce).

Enfin, en cas d’inexécution par le bailleur ou par le locataire de leurs obligations contractuelles, la résolution du bail peut être demandée en justice.

11- Dans quels cas le locataire peut-il prétendre au paiement de l’indemnité d’éviction et comment se calcule-t-elle ?

Le principe dans un bail commercial est le droit au renouvellement dont bénéficie le locataire. A défaut de renouvellement, celui-ci peut prétendre au versement d’une indemnité d’éviction.

Par exception, le bailleur peut refuser le renouvellement du bail sans être tenu au paiement de l’indemnité d’éviction (article L145-17 du Code de commerce) :

  • S’il justifie d’un motif grave et légitime à l’encontre du locataire,
  • S’il établit que l’immeuble, reconnu en état d’insalubrité par l’autorité administrative, doit être totalement ou partiellement démoli, ou s’il est établi qu’il ne peut plus être occupé sans danger en raison de son état.

L’indemnité d’éviction doit réparer le préjudice causé au locataire par le défaut de renouvellement.

Elle est composée d’une indemnité principale qui est une indemnité de perte du fonds ou de transfert à laquelle peuvent s’ajouter des indemnités accessoires (remboursement éventuel des frais de déménagement et de réinstallation, ainsi que les frais et droits de mutation à payer pour un fonds de même valeur).

Pour ce qui est de l’évaluation de l’indemnité principale, il existe différentes méthodes d’évaluations. L’estimation est généralement fondée sur les éléments chiffrés des trois derniers exercices connus.

12- Le locataire peut-il librement céder le bail commercial ou louer le fonds de commerce ?

Cela dépendra de la rédaction du bail commercial.
Il arrive que les baux commerciaux interdisent la cession du bail commercial sans accord préalable et écrit du bailleur qui peut également demander à être présent lors de la cession. Il semble judicieux que le bail se limite à une clause imposant l’information du bailleur de la cession du bail commercial dans le cadre de la vente du fonds de commerce.

Quant à la sous-location, il est fréquent qu’elle soit interdite par les baux commerciaux. Il convient d’être vigilent lors de la rédaction d’une telle clause car l’interdiction de la sous-location signifie que le fonds de commerce ne pourra pas être mis en location gérance.


Doit-on respecter un délai d’exploitation pour mettre son fonds en location-gérance ?

Pour mettre son fonds de commerce en location gérance, le propriétaire devait en principe l’avoir exploiter personnellement pendant deux ans.
La loi du 19 juillet 2019 de simplification, de clarification et d’actualisation du droit des sociétés a supprimé cette condition minimum d’exploitation. Aussi, depuis le 21 juillet 2019, tout propriétaire d’un fonds de commerce peut le mettre en location-gérance, peu importe la durée pendant laquelle il a exploité le fonds.


Je cède mon droit au bail à une personne qui ne verse pas ses loyers. Mon ancien bailleur peut-il me demander de les payer ?

Par l’effet de la clause de garantie solidaire, tous les cessionnaires successifs d’un même bail sont responsables de la bonne exécution et, en cas de défaillance du locataire en place, peuvent être poursuivis par le bailleur.
Cette garantie ne joue normalement, sauf clause contraire, que pendant la durée du bail lui-même et non pour tous les renouvellements successifs. Dans le cas contraire, l’obligation serait en effet perpétuelle et, à ce titre, nulle.
Par ailleurs, l’article L. 145-16-2 du code de commerce dispose que « si la cession du bail commercial s’accompagne d’une clause de garantie du cédant au bénéfice du bailleur, celui-ci ne peut l’invoquer que durant trois ans à compter de la cession dudit bail ». La disposition n’est pas d’ordre public, mais les juges pourraient en décider autrement.

Chemin